LETTRE OUVERTE – Monsieur le Président, retirez votre projet de réforme des retraites
Ce mardi 11 avril, à l’initiative du groupe Les Écologistes, le groupe Breizh a-gleiz (UDB et Ensemble sur nos Territoires) a co-signé une lettre ouverte adressée au Président de la République lui demandant de retirer son projet de réforme des retraites.
Précisant leur attachement à la démocratie et à ce qu’elle suppose de justice et de débats réels, la majorité des élu·e·s au Conseil régional de Bretagne ont apporté leur soutien à cette lettre ouverte.
A travers cette tribune, nous faisons le vœu qu’une sortie de crise, dans laquelle le Président a engagé le pays, puisse s’engager dans les prochains jours.
Lettre ouverte au Président de la République
Pour le retrait du projet de réforme des retraites
Monsieur le Président, vous portez depuis cet automne un projet de réforme des retraites, par l’intermédiaire de votre gouvernement. Il repose sur deux piliers essentiels :
- Le recul de l’âge minimum de départ à la retraite de 62 à 64 ans ;
- L’accélération de l’augmentation de la durée de cotisation nécessaire, 43 ans, pour faire valoir les droits à la retraite.
Votre projet a pour objectif premier d’afficher une baisse de la dépense publique globale en France, alors même que par vos décisions vous creusez les déficits publics par des baisses considérables de la fiscalité du capital et des entreprises. Dernier exemple en date, la suppression de la CVAE qui vient ponctionner les budgets publics de 15 Mds€ par an.
Si l’équilibre du système de retraites en France nécessitait des moyens financiers complémentaires, ce qui n’est pas avéré, les leviers disponibles sont nombreux, ne serait-ce que de reconsidérer la masse des exemptions de cotisations sociales décidées depuis ces vingt dernières années. Les débats publics l’ont largement souligné depuis des mois.
L’injustice profonde de votre projet a été largement remarquée, il ferait porter le poids de cette réforme prioritairement sur les personnes qui ont commencé leur activité professionnelle tôt ainsi que sur les celles qui ont eu des interruptions de carrières, au premier rang desquelles on retrouve les femmes, et sur l’ensemble des salariés les plus modestes.
Votre projet a suscité un rejet unanime des organisations syndicales, tant sur le fond que sur la forme. Il est également très largement rejeté dans la population, tout particulièrement par l’ensemble des personnes concernées, les actifs. Ce rejet se traduit par des mobilisations inédites par leur ampleur. En particulier en Bretagne où des manifestations pacifiques rassemblent des foules considérables dans l’ensemble de nos villes, grandes et petites, depuis des semaines.
Face à cette expression massive et pacifique du refus de votre projet, votre gouvernement a refusé obstinément d’engager un dialogue réel avec les organisations syndicales.
Pire, vous avez choisi de vous appuyer sur une procédure parlementaire plus que contestable et de présenter votre réforme dans le cadre d’un projet de loi de finances de la sécurité sociale, afin de raccourcir au maximum le temps des débats parlementaires pour, finalement, faute de majorité, « faire passer » le texte sans vote en vous appuyant sur le fameux article 49.3 de la Constitution.
Cette méthode, conjuguée aux mensonges et approximations proférés par différents membres de votre gouvernement dans la présentation de votre projet, a renforcé nos concitoyennes et concitoyens dans leur rejet de vos propositions. Les manifestations massives qui continuent depuis en sont le témoin.
Enfin, nous constatons que des actes de violences, parfois très graves, se multiplient depuis la fin de la procédure parlementaire. Ces actes de violences sont le fait de personnes agissant en marge des manifestations pacifiques, mais aussi le fait de représentants des forces de l’ordre qui, pour certains, appliquent des méthodes inacceptables à l’occasion de ces manifestations.
Cette dérive violente a également été constatée à l’occasion d’autres manifestations, le 22 mars à Rennes lors d’une manifestation de marins-pêcheurs, le 25 mars dans les Deux-Sèvres lors du rassemblement de protestation contre la création de « méga bassines ». À chacune de ces occasions des observateurs extérieurs : Presse, Ligue des Droits de l’Homme, Conseil de l’Europe, ont souligné un usage excessif de la force par les forces de l’ordre. Les causes de ces actes inadmissibles doivent être éclaircies au plus vite. De nombreuses personnes ont été blessées, parfois gravement, dans ces affrontements, c’est une tragédie et ce n’est pas acceptable.
Face aux multiples défis que doivent affronter la France et l’Europe, il est essentiel de restaurer la capacité collective à débattre et décider démocratiquement dans le respect de la justice sociale et de la prise en compte des enjeux écologiques et climatiques.
Monsieur le Président de la République, l’article 1 de la Constitution dit que la République est démocratique et sociale. C’est pourquoi, nous, élu·es du Conseil régional de Bretagne, profondément attachés à la démocratie sociale et à ce qu’elle suppose de justice et de débats réels, vous demandons de retirer votre projet de réforme des retraites.
Tribune co-écrite par les élu·e·s du Groupe Écologistes au Conseil régional de Bretagne, Goulven Oillic, Ronan Pichon, Christine Prigent.
Tribune soutenue par les groupes politiques du Conseil régional de Bretagne signataires :
- Nil CAOUSSIN et Aziliz GOUEZ, co-président·e·s de Breizh a-gleiz – Autonomie, Écologie et Territoires
- Fanny CHAPPÉ, présidente de l’Alliance progressiste des socialistes et démocrates de Bretagne
- Daniel CUEFF, président de Bretagne ma vie
- Claire DESMARES, présidente des Écologistes de Bretagne
- Katja KRÜGER, présidente de Communistes et Progressistes
- Paul MOLAC, président d’Autonomie et régionalisme